ART

Henri Rivière : Précurseur de la Bande Dessinée Moderne

Quelle vie et quels talents chez cet artiste qui a influencé grandement la BD française.

Henri Rivière (1864-1951) était un artiste français aux multiples talents : peintre, graveur, illustrateur et créateur de théâtre d’ombres. Fasciné par l’art japonais, il développa un style unique mêlant influences orientales et sensibilité bretonne. Il passa une grande partie de sa vie à représenter les paysages de Bretagne.

De plus, en un élégant clin d’œil, il fait écho aux « Trente-six vues du Mont Fuji » d’Hokusai, dans sa célèbre série « Les Trente-six vues de la Tour Eiffel » (1888-1902).

Enfin, Directeur artistique du Chat Noir, le cabaret montmartrois légendaire, il y créa des spectacles d’ombres chinoises innovants qui influencèrent le théâtre et les arts visuels de son époque.

La façon dont Rivière structure l’espace dans ses lithographies a visiblement eu des influences majeures dans la bande dessinée moderne. Ses compositions en aplats, héritées de l’estampe japonaise, utilisent des plans qui créent une profondeur certaine, une technique que l’on peut retrouver dans de nombreuses BD contemporaines. Cependant, là où la bande dessinée organise ces espaces en séquences narratives avec des cases qui guident le regard pour raconter une histoire progressive, Rivière propose une image unique, et contemplative, où le temps semble suspendu.

Rivière excellait dans l’usage de couleurs limitées et d’aplats francs, une caractéristique qu’il partage avec la bande dessinée traditionnelle, notamment la « ligne claire » développée par Hergé. Ses lithographies utilisent souvent trois à cinq couleurs en superposition qui rappellent les choix chromatiques de certains coloristes de BD comme Yves Chaland ou Floc’h ; mais chez Rivière la couleur participe plus à une quête esthétique.

La bande dessinée est donc un art « séquentiel » qui déploie une narration dans le temps, où chaque case est un moment qui s’enchaîne avec les autres pour créer un récit. Rivière, même dans vues de la Tour Eiffel (qui font parfois penser à Schuitten) ou ses paysages bretons, propose plutôt des variations sur un thème, une forme primitive de « bande dessinée sans bulles ».

Aujourd’hui, après des décennies d’oubli relatif, Henri Rivière apparaît comme un précurseur discret de la modernité, un artiste qui a su concilier tradition et innovation, rigueur technique et sensibilité poétique.

A découvrir ou redécouvrir…

Articles similaires

Bouton retour en haut de la page