LIVRE

Paz : la mort est la seule manière d’obtenir la paix

Un grand thriller narco-politico-shakespearien chez Gallimard et signé par un français… violent et percutant !

L’histoire

Un vieux requin de la politique… un ancien officier des forces spéciales désormais chef de la police de Bogotá…un combattant des FARC qui a déposé les armes.  Un père, deux fils, une tragédie familiale sur fond de guérilla colombienne.

Le livre

Quasi à l’égal d’un James Ellroy (voir American Tabloïd ou Perfidia) et d’un Don Winslow (La griffe du chien, La Frontière…) Caryl Ferey se comporte en reporter-auteur de thrillers ultra-violents car ultra-réalistes… la réalité dépassant parfois la fiction.

L’hyper-réalisme est poussé à son comble dans Paz, avec le portrait d’une société entière gangrenée par la drogue, la corruption, la concupiscence et la compromission inévitable des populations appauvries et apeurées par une violence terrifiante.

Ici, c’est la Colombie toujours hantée par l’image Pablo Escobar et les drames permanents d’une lutte pour le pouvoir entre cartels, politiques, guérilléros ex ou toujours FARC, milices d’extrême-droite… qui sert de cadre, de Bogota à Medellin à une tragédie quasi shakespearienne et filiale.

2 mouvements de fond agissent en parallèle, en souterrain l‘un de l’autre : le premier très reportage nous donne à comprendre ce pays d’Amérique du Sud débordé par les agissements de quelques uns (nombreux semble t-il) et le second compose un drame familial d’amour-haine dans une fratrie bousculée par le mensonge d’un père manipulateur.

Très accrocheur, et bienvenue dans un paysage de thrillers de ce niveau où il manquait un auteur français de qualité.

L’auteur

Caryl Férey s’est imposé comme l’un des plus grands auteurs de thriller avec Zulu, roman sur l’Afrique du Sud récompensé par le Grand Prix de littérature policière et le Grand Prix des lectrices de Elle policier. S’inscrivant dans la lignée de Condor et de Mapuche, roman sur l’Argentine, lauréat du prix Landerneau polar et Meilleur Polar français du magazine Lire, Paz est son sixième roman à la Série Noire.

Son interview

» Paz, la paix… Le titre ne manque pas d’ironie, cette paix étant plutôt celle des cimetières ou des charniers…
En effet, même si la Colombie n’est plus en guerre civile, les trafics et les meurtres continuent. Je voulais m’y rendre dès les années 1990, mais l’intérêt d’aller dans un pays, c’est de pouvoir circuler, de rencontrer les gens. Là, c’était trop dangereux. Puis le processus de paix s’est enclenché, le président Santos a reçu le Nobel de la paix, ce qui était une façon de le pousser à tenir ses engagements, il y a eu un référendum sur l’accord avec les FARC… J’étais alors en plein dans l’écriture du roman, et je me disais « que va-t-il se passer ? ». C’est cette histoire en mouvement qui fait le lien entre roman et réalité.

Dès la troisième page, le lecteur est confronté à un crime incroyablement barbare, et ce n’est qu’un début. Vous n’en avez pas un peu rajouté ?
Au contraire, je reste très en dessous de la réalité, trop épouvantable pour être décrite. Durant la Violencia, les protagonistes se sont non seulement massacrés, mais livrés à des mises en scène macabres de cadavres découpés absolument effarantes. Devant de telles horreurs, je me suis demandé « mais qui sont ces gens ? ».
La Colombie, premier territoire du continent américain où les Européens ont débarqué pour imposer leur « civilisation », est devenue le sanctuaire de l’ultraviolence. Belle ironie de l’histoire !

Très vite, on a le sentiment qu’un rien suffirait à remettre le feu aux poudres…
Ce n’est pas parce que le processus de paix a été signé que c’est terminé. Il y a tellement d’enjeux de pouvoir et d’argent, entre la drogue ou les richesses naturelles, que beaucoup n’ont aucun intérêt à la paix. La guerre, c’est toujours bon pour les affaires. Sans oublier que l’ancien président Uribe, très proche de l’extrême-droite paramilitaire, en clair les escadrons de la mort, et des narcotrafiquants, continue à tirer les ficelles.Le personnage principal, Lautaro Bagader, chef de la police de Bogota, apparaît plus à la recherche de lui-même que des auteurs d’une nouvelle vague d’assassinats…
Cette découverte, dès les premières lignes, d’un cadavre qui est quand même dans un très, très sale état, est pour moi un prétexte pour parler de la Violencia, cet épisode d’ultraviolence perpétré par les paramilitaires. Lautaro est lui-même plein de zones grises, il se retrouve face à ce qu’il a provoqué. Son passé lui revient en boomerang, et au centuple.
Mais le sujet central du roman, c’est la famille. Entre un père tout-puissant dans les milieux politiques et deux frères qui s’affrontent, Angel l’ancien guérillero des FARC et Lautaro l’ancien paramilitaire, la famille Bagader réunit toute la complexité de la Colombie. Au-delà du roman noir et de l’intrigue policière, l’histoire de ces rapports de force père-fils est universelle, comme une tragédie grecque ou shakespearienne. »

Dans la même veine

https://mictolblog.com/la-frontiere-fin-de-trilogie-et-debut-dune-reflexion/

La note de l'auteur

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