Avec Rushdie le conte oriental se mêle toujours à une vision pointue d’une humanité perfectible et terriblement attachante. Avec la maison Golden, on retrouve telle une métaphore de nos existences, la vie agitée d’une famille indo-newyorkaise quelque peu atypique.
Le pitch
Le jour de l’investiture de Barack Obama, un énigmatique millionnaire venu d’un lointain Orient prend ses quartiers dans une communauté préservée au coeur de Greenwich Village avec ses trois fils adultes aussi brillants qu’excentriques. René Unterlinden, jeune réalisateur velléitaire, comprend que ces étranges voisins peuvent devenir une source d’inspiration inespérée. Convoquant la littérature, la pop-culture et le 7e art, Salman Rushdie écrit ici le roman à la fois angoissant et jubilatoire de l’identité, de la vérité, de la terreur et du mensonge dans leurs atours contemporains.
Le livre
Salman Rushdie restera éternellement orphelin de l’Inde. Tous ses écrits y font référence, même si l’intrigue se déroule à des milliers de kilomètres de son pays natal.
Objet dès 1989 d’une fatwa de l’ayatollah Khomeini à la suite de la publication de son roman Les Versets sataniques, Rushdie est devenu un symbole de la lutte pour la liberté d’expression et contre l’obscurantisme religieux. Pourtant dans ce nouvel liste on trouve peu ce thème majeur (sauf dans les dernières pages).
Ici, c’est le mystère d’une famille débarquée à New York qui intrigue. Un jeune voisin, cinéaste, devenu familier de la famille apporte son oeil extérieur pour une narration à la fois distante et au coeur du réacteur d’une famille tourmentée et aux diversités multiples.
L’ensemble est attachant, même si la « morale » de cette histoire paraît tout aussi mystérieuse que cette famille.
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Extrait
« Qu’est-ce qu’une bonne vie ? Quel en est le contraire ? Voilà des questions auxquelles il n’est pas deux hommes qui apporteront la même réponse. En ces temps de lâcheté qui sont les nôtres, nous refusons d’accepter la grandeur de l’Universel pour soutenir et glorifier nos sectarismes locaux, aussi est-il peu de choses sur lesquelles nous puissions nous mettre d’accord. En ces temps dégénérés qui sont les nôtres, des individus qui ne poursuivent que la vanité et le profit personnel – des individus creux et grandiloquents pour qui il n’existe rien d’interdit si cela peut faire avancer leur cause mesquine – vont se présenter comme de grands leaders et des bienfaiteurs agissant pour le bien commun et accusant tous ceux qui s’opposeront à eux de mensonge, de jalousie, de mesquinerie, de stupidité, de rigidité, et, au prix de l’exact renversement de la vérité, de malhonnêteté et de corruption. Nous sommes à ce point divisés, si hostiles les uns envers les autres, nous nous laissons à ce point guider par le pharisaïsme et le mépris, nous sommes à ce point enfoncés dans le cynisme que nous qualifions d’idéalisme nos manières pompeuses, nous sommes à ce point déçus par nos dirigeants, à ce point prompts à conspuer les institutions de notre État que le mot même de bonté a été vidé de son sens et devrait, peut-être, être laissé de côté un certain temps, à l’instar d’autres mots empoisonnés, tels que spiritualité, tels que solution finale et tels que (du moins quand on l’applique aux gratte-ciel et aux pommes de terre frites) liberté. »
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